La loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique, dite « Loi 3DS », a prévu de nouvelles hypothèses selon lesquelles le budget général peut être mobilisé pour abonder les budgets annexes relatifs à la compétence eau et assainissement.
Pour rappel, il est en principe interdit aux collectivités en charge du service de prendre en charge dans leur propre budget des dépenses au titre des services publics industriels et commerciaux. La compétence eau et assainissement, qui est un service public industriel et commercial, n’échappe donc pas à cette interdiction.
Cependant, dans certains cas strictement prévus par le code général des collectivités territoriales, le budget général peut alimenter les budgets annexes des services publics industriels et commerciaux.
TOUR D’HORIZON SUR LE DROIT APPLICABLE AVANT L’ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA LOI 3DS
L’article L. 2224-2 du CGCT opère une distinction entre deux catégories d’exceptions : celles qui nécessitent le respect d’une condition formelle avec l’adoption d’une délibération motivée de l’organe délibérant, et celles qui sont applicables sans le respect d’une telle exigence.
En premier lieu, il est possible que le budget général prenne en charge des dépenses au titre des services publics industriels et commerciaux sur délibération motivée de l’organe délibérant lorsque :
– les exigences du service public conduisent la collectivité à imposer des contraintes particulières de fonctionnement ;
– le fonctionnement du service public exige la réalisation d’investissements qui, en raison de leur importance et eu égard au nombre d’usagers, ne peuvent être financés sans augmentation excessive des tarifs ;
– après la période de réglementation des prix, la suppression de toute prise en charge par le budget de la commune aurait pour conséquence une hausse excessive des tarifs.
En deuxième lieu, le budget général peut abonder les budgets annexes d’un service public industriel et commercial, sans adoption de délibération préalable :
– dans les communes de moins de 3000 habitants et les établissements publics de coopération intercommunale dont aucune commune membre n’a plus de 3 000 habitants, aux services de distribution d’eau et d’assainissement ;
– quelle que soit la population des communes et groupements de collectivités territoriales, aux services publics d’assainissement non collectif, lors de leur création et pour une durée limitée au maximum aux cinq premiers exercices ;
LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA LOI 3DS
La loi 3DS est venue ajouter deux nouvelles exceptions applicables lesquelles ne sont pas conditionnées par l’adoption d’une délibération motivée.
Tout d’abord, les EPCI à fiscalité propre compétents en matière d’eau et d’assainissement pourront désormais, sans délibération motivée, prendre en charge sur leur budget général les dépenses liées à la réalisation d’investissement pour le fonctionnement du service eau et assainissement dans le but d’éviter une augmentation excessive des tarifs pour les usagers.
Par ailleurs, la loi 3DS autorise également les EPCI à fiscalité propre à mobiliser leur budget général pendant la période d’harmonisation des tarifs entre les différents territoires des communes membres lors du transfert de la compétence eau et assainissement. Le budget général servirait alors à subventionner les tarifs les plus bas durant la phase de convergence vers un tarif commun à l’ensemble des territoires des communes membres.
Si la loi 3DS ne prescrit pas de durée concernant la période d’harmonisation des tarifs, il ne s’agit pas d’un oubli de la part du législateur. Outre la nécessité de prendre en compte la diversité des situations locales, l’absence de délai fixé par la loi permet aux EPCI à fiscalité propre de bénéficier d’une certaine marge de manœuvre pour définir les conditions d’harmonisation de la tarification en matière d’eau et d’assainissement sur leur territoire.
La durée de la période d’harmonisation des tarifs devra donc correspondre au temps nécessaire pour que l’ensemble des membres s’entendent sur les tarifs qu’ils souhaiteront appliquer à leurs administrés. Dès lors, l’harmonisation tarifaire devra intervenir dans un délai raisonnable.
Cette absence de délai impératif a pour conséquence concrète de faire peser sur le contribuable, pendant un délai potentiellement long, des dépenses qui étaient portées jusqu’alors par l’usager du service.