Il est ADMYS qu’en matière de référé-suspension contre une décision d’aménagement, l’existence de conclusions défavorables de la commission d’enquête implique, pour le requérant, de se prévaloir d’une condition d’urgence à suspendre lorsque la décision soumise à enquête publique préalable ne porte pas sur une opération susceptible d’affecter l’environnement.
En l’espèce, une société avait demandé la suspension d’un arrêté préfectoral déclarant d’utilité publique un projet de constitution d’une réserve foncière au profit d’un établissement public foncier, et autorisant ce dernier à acquérir, au besoin par voie d’expropriation, les immeubles nécessaires à sa réalisation.
La société requérante soutenait que la suspension de l’exécution, par le juge des référés, de la décision contestée n’était pas subordonnée à la condition d’urgence prévue par l’article L. 521-1 du Code de justice administrative (CJA) dès lors que cette décision avait été prise après des conclusions défavorables de la commission d’enquête.
Par une ordonnance du 12 octobre 2023 (n° 2306756), le juge des référés du Tribunal administratif de Strasbourg a fait droit à la demande de la société requérante sans examiner la condition d’urgence, et a prononcé la suspension de l’exécution de l’arrêté querellé. C’est au demeurant ce même raisonnement que suivra, moins d’un mois plus tard, le juge des référés du même pour suspendre partiellement le plan local d’urbanisme intercommunal de l’Eurométropole de Metz (dans des circonstances toutefois différentes).
Saisi d’un pourvoi en cassation par l’établissement public foncier bénéficiaire de l’arrêté, par la commune concernée et par le ministre de la Transition écologique, le Conseil d’État, dans son arrêt n° 489079 du 27 décembre 2024, a annulé, pour erreur de droit, l’ordonnance de référé prononcée en première instance et a précisé, à cette occasion, les contours de la dispense de démonstration de la condition d’urgence à suspendre un acte administratif précédé de conclusions défavorables d’une commission d’enquête ou d’un commissaire-enquêteur.
Le Conseil d’État rappelle tout d’abord qu’il résulte des dispositions combinées de l’article L. 554-12 du CJA et de l’article L. 123-16 du Code de l’environnement que la suspension de l’exécution, par le juge des référés, d’une décision d’aménagement soumise à enquête publique préalable n’est pas subordonnée à la condition d’urgence prévue par l’article L. 521-1 du CJA lorsque, d’une part, l’enquête publique est régie par le Code de l’environnement et, d’autre part, cette décision a été prise après des conclusions défavorables du commissaire enquêteur ou de la commission d’enquête.
Cependant, il en va différemment lorsque la décision ne porte pas sur une opération susceptible d’affecter l’environnement, comme en l’espèce, le projet de constitution d’une réserve foncière. Dans l’affaire qui lui était soumise, la Haute juridiction administrative a retenu que l’enquête publique était régie par les seules dispositions du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique et non par celles du Code de l’environnement, de sorte que la demande de suspension présentée au juge des référés demeurait soumise à la condition d’urgence.
Toutefois, réglant l’affaire au fond, le Conseil d’Etat a toutefois considéré que la condition d’urgence n’était pas satisfaite en l’espèce. Il a ainsi rejeté au fond la demande d’annulation de la DUP formulée par la société requérante.