Il n’est pas ADMYS, lorsque le préfet met en œuvre les pouvoirs qu’il tient de l’article L. 153-25 du Code de l’urbanisme, que la commune puisse modifier son projet de plan local d’urbanisme (PLU) sans procéder à une nouvelle enquête publique dès lors que les modifications portent atteinte à l’économie générale du plan.
Dans un arrêt du 13 juin 2024 (n° 473684), le Conseil d’État est venu préciser les conditions dans lesquelles un PLU modifié à la suite de la mise en œuvre par le préfet de ses pouvoirs devait faire l’objet d’une nouvelle enquête publique avant son adoption.
En l’espèce, le conseil municipal de Lège-Cap-Ferret (Gironde) avait, par une délibération, adopté son projet de PLU. La commune n’étant toutefois pas couverte par un schéma de cohérence territoriale (SCoT), le préfet avait mis en œuvre les pouvoirs qu’il détient de l’article L. 153-25 du Code de l’urbanisme.
Pour rappel, cet article lui permet, dans le mois qui suit la transmission de la délibération d’approbation d’un PLU portant sur un territoire qui n’est pas couvert par un SCoT, de demander aux auteurs du plan d’apporter les modifications qu’il estime nécessaires pour des motifs limitativement énumérés, par exemple s’il estime que le plan est contraire à un projet d’intérêt général ou autorise une consommation excessive de l’espace.
Après avoir modifié son projet de PLU en conséquence, la commune avait approuvé par délibération le nouveau PLU, sans procéder à une nouvelle enquête publique.
Les requérants, qui contestaient le classement de leur terrain en zone naturelle, soutenaient notamment que les modifications intervenues étaient de nature à porter atteinte à l’économie générale du plan et nécessitaient une nouvelle enquête publique.
Le tribunal administratif de Bordeaux, par un jugement du 27 mai 2021 n° 2000070, puis la Cour administrative d’appel de Bordeaux, dans un arrêt du 2 mars 2023 n° 21BX03224, ont tous deux rejeté leur requête, cette dernière ayant jugé que « les modifications du PLU résultant de la mise en œuvre par le préfet de ses pouvoirs n’impliquent pas la réalisation d’une nouvelle enquête publique préalablement à leur adoption alors même qu’elles porteraient atteinte à l’économie générale du plan ».
Mais saisi en cassation, le Conseil d’État a infirmé ce raisonnement et estimé que « de telles modifications ne peuvent toutefois intervenir sans être soumises à une nouvelle enquête publique lorsqu’elles portent atteinte à l’économie générale du plan ».
Le Conseil d’État fait ici l’application de sa jurisprudence « Lille Métropole communauté urbaine » du 12 mars 2010, n° 312108, dans lequel il avait considéré qu’« il était loisible à l’autorité compétente de modifier le plan d’occupation des sols après l’enquête publique, sous réserve, d’une part, que ne soit pas remise en cause l’économie générale du projet et, d’autre part, que cette modification procède de l’enquête, ces deux conditions découlant de la finalité même de la procédure de mise à l’enquête publique ».
Transposant cette jurisprudence à l’hypothèse dans laquelle un PLU est modifié pour tenir compte des observations émises par le préfet, la haute juridiction administrative considère en l’espèce qu’en jugeant que les modifications du PLU n’impliquaient pas la réalisation d’une nouvelle enquête publique, alors même qu’elles porteraient atteinte à l’économie générale du plan, et en s’abstenant en conséquence de procéder à la recherche d’une telle atteinte, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit.
Par cette décision, le Conseil d’État précise ainsi qu’une nouvelle enquête publique doit être réalisée dès lors que les modifications apportées au plan, à la suite de la mise en œuvre par le préfet de ses pouvoirs de l’article L. 153-25 du Code de l’urbanisme, remettent en cause l’économie générale du projet de PLU. Il convient ainsi pour les communes et les EPCI dont le territoire n’est pas couvert pas un SCoT d’être vigilant sur l’opportunité ou non de réaliser une nouvelle enquête publique le cas échéant.