Pour la treizième fois depuis son arrivée à Matignon au mois de mai 2022, Elisabeth Borne a eu recours mercredi 18 octobre 2023 à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution pour l’adoption de la première partie du projet de loi de finances. Elle avait déjà eu recours à cette procédure pour l’adoption de la loi de programmation des finances publiques 2023-2027.
Pour rappel, cet article offre la possibilité au Premier ministre de faire adopter un texte sans passer par le Parlement, en engageant en parallèle la responsabilité du gouvernement.
Concrètement, le projet de loi est considéré comme adopté si aucune motion de censure n’est déposée. Dans le cas inverse, si au moins un dixième des membres de l’Assemblée nationale signe une motion de censure et la dépose dans les vingt-quatre heures, celle-ci sera adoptée. Le gouvernement peut alors être renversé si la majorité absolue des membres de l’Assemblée vote la motion. À défaut, le projet de loi est considéré comme adopté.
Symbole du caractère peu risqué de cette procédure pour le gouvernement, aucune motion de censure provoquée n’a été adoptée depuis la première utilisation de l’article 49 alinéa 3 en 1958.
Dans le contexte politique actuel, la Première ministre a fait le choix de s’en remettre à cet outil constitutionnel afin de faire adopter la première partie du budget 2024. Cette première partie correspond au volet « Recettes » de la loi de finances. Il est à noter que la mise en œuvre de cet article 49 alinéa 3 est intervenu avant même que l’examen de l’article liminaire du projet de loi de finances ne débute.
La loi de finances doit être adoptée avant le 31 décembre de chaque année. Le choix de la procédure du « 49.3 budgétaire » est emprunt de pragmatisme et permet d’empêcher un « shutdown », c’est-à-dire un blocage du budget et donc des institutions.
La cheffe du gouvernement a rappelé dans son discours tenu au Palais Bourbon que le gouvernement avait discuté « avec tous les groupes notamment dans le cadre des Dialogues de Bercy » et qu’il avait accepté de faire évoluer ce texte en « reprenant des amendements de la majorité comme des oppositions ». Plusieurs exemples sont alors cités : l’assouplissement des conditions d’accès au prêt à taux zéro désormais ouvert à 6 millions de Français, l’abattement exceptionnel pour les plus values foncières pour libérer des terrains à bâtir, la lutte contre la fraude, le renforcement des dispositifs d’aide au carburant pour les travailleurs, etc.
De manière plus globale, 358 amendements ont été retenus. A titre d’exemple, la réduction de l’abattement fiscal de 71 à 50 % concernant les revenus des meublés touristiques (de type Airbnb) en zone tendue a été intégrée dans le texte. Pour les zones non tendues, l’abattement reste à 71% mais avec un seuil abaissé à 50 000 euros par an.
De même, le texte prolonge de trois années supplémentaires le dispositif dit « Coluche » ouvrant la voie à une défiscalisation à hauteur de 75% des versements effectués aux associations venant en aide à des personnes en difficulté.